La Cuisine russe Michel Parfenov

Durant l"ete 1944, la Croix-Rouge russe avait organise a Gif-sur-Yvette, pres de Paris, un camp de vacances pour les enfants de l"immigration. Dans le ciel passaient sans discontinuer des vagues de forteresses volantes americaines, d"enormes avions, derriere les-quels pleuvaient longtemps encore des filaments argentes. Tout le monde ici etait russe, tout le monde parlait russe, et le dimanche les parents venaient en visite et organisaient des fetes russes. Le matin, on nous servait de la bouillie d"avoine, de I"ovsianka, qu"on appelait kacha, il fallait la manger et on la mangeait, nous etions des enfants rachitiques a qui on avait inculque qu" "on ne doit pas gacher la nourriture". Ensuite a Villemoisson, dans la grande banlieue pari-sienne, de nouveau dans une maison pour les enfants russes, je garde le souvenir du kissel, ce dessert a base de fecule de pomme de terre, une espece de gelee. II etait au vin rouge et ca nous faisait tourner la tete un peu comme le vin de messe chaud donne a la fin de la liturgie orthodoxe. Le kissel plus la terrifiante Baba-Yaga, la sorciere, sur son balai et sa maison montee sur pattes de poules, rien de tel pour vous faire tenir tranquille la nuit et avoir peur pour longtemps du noir. Enfant, en France, je savais que je n"etais pas tout a fait francais parce qua la maison nous mangions une autre cuisine et que j"allais dans de droles d"epiceries comme celle de Pychman decrite par Nina Ber-berova, ou, "outre les conserves de caviar d"aubergine et de poivrons farcis, on trouvait toutes les varietes de vodka et de liqueurs, de caramels Moskva, des pirojki, et dans un coin, sur une etagere, des icones et des cuilleres en bois peintes"... Это и многое другое вы найдете в книге La Cuisine russe (Michel Parfenov)